Après la première guerre mondiale, de nombreux projets visant à produire de l'électricité à partir de l'énergie hydraulique virent le jour.
En 1927, les collectivités créèrent la Société des Forces Hydrauliques de la 17ème Région qui devint, en fin 1928 Energie Electrique de la Moyenne Dordogne EEMD.
Cette société d'économie mixte fut dirigée par M. Paul Riban, Président de la Chambre de Commerce d'Aurillac, puis à partir de 1933 par Messieurs Sauvanet et Doucet. Après bien des vicissitudes, elle obtînt la concession d'exploitation de la chute de l'Aigle et les moyens financiers de conduire le projet.
L'EEMD confia les études à M. Coyne, assisté de M. Mary (qui lui succéda en 1942), et d'André Decelle. Ils s'appuyèrent sur les compétences du Service des Grands Barrages dirigé par M. Bellier.
La conduite du chantier fut confiée à M. Pfaff, assisté de MM Bonnet, Fontan et Dhonneur.
La réalisation des travaux échut à différentes sociétés : Société de Construction Corrézienne, Avogadri… et Ballot, qui fût la plus importante.
EEMD pilota ainsi l'ensemble du projet, jusqu'à sa nationalisation, par la loi du 8 avril 1946.
C'est en 1929 que le projet de la construction se concrétise. Quelques années encore et le décret de concession est signé en décembre 1934.
Dès lors les travaux prennent une tournure plus concrète. La première opération visible est la construction de la passerelle permettant la communication entre les deux rives. Pour permettre de travailler sur le lit de la rivière, deux petits barrages (des batardeaux) sont construits en amont et en aval du chantier principal et la Dordogne est déviée dans une galerie de dérivation. La desserte routière vers Chalvignac est achevée.
Nous sommes à l’été 1939. Les travaux peuvent commencer.
Mais la Guerre vient d’être déclarée. Il s’ensuit une période incertaine avant que les autorités allemandes ne donnent le feu vert qui marque le démarrage effectif des travaux en novembre 1940.
Mais il n’est pas simple de mener un tel chantier, en temps de guerre, dans un lieu si peu accessible.
Il est principalement conduit par l'entreprise Ballot sous l'autorité de l'ingénieur Mary.
Il faut trouver de la main d’œuvre (ce qui restera un souci récurrent), déjouer les pénuries et faire face aux tracasseries et contrôles administratifs aussi bien des autorités allemandes que du régime de Vichy.
De part et d’autre du chantier deux téléphériques transportent les matériaux à l’aide de bennes. L’un, à l’est, long de plus de 9 km approvisionne le ciment venant de la ligne de chemin de fer Bort Aurillac, l’autre, à l’ouest, de 5 km de long, les agrégats extraits de la ballastière de Valette. Le tout aboutit à l’usine à béton qui produit les 350 000 m3 nécessaires à la réalisation de l’ouvrage.
Des trésors d’ingéniosité sont également déployés pour se procurer les ferrailles et autres matériaux indispensables. Nous sommes en guerre, rien n’est simple et pourtant ce barrage voit la mise en œuvre d’innovations techniques importantes pour l’époque.
La construction se poursuit avec ses aspects impressionnants…
A l'entour, tout ce qui peut servir de logement est occupé. En contrebas du Barrage, la cité d'Aynes accueille les travailleurs, leurs familles et s'agite des occupations d'un village actif.
Près de 1500 hommes, dont beaucoup de célibataires contribuent à la construction.
Près d'une trentaine de nationalités différentes cohabitent en paix dans ce petit monde. Méditons…
A côté des logements ouvriers et des dortoirs, le village de bois et de tôles se dote d'une chapelle, d'un bureau de poste, d'une infirmerie, d'un terrain de sport, d'une coopérative, d'un cinéma, d'une épicerie et de nombreuses cantines souvent tenues par des italiens.
Leur vie est faite de longues et pénibles journées de travail, de joies, de peines qu'un air d'accordéon fait parfois oublier. Une vie si intense qu'elle marquera de façon indélébile tous ceux qui la vécurent.